Surmonter la crise sanitaire avec de l’aide et un plan de relance

04/02/2021 - 10h

Les investissements et des revenus décents sont essentiels pour une reprise économique rapide et structurelle

Dans une carte blanche sur la crise sanitaire parue le 4 février, la FEB plaide pour la suppression progressive des mesures d’aide temporaires et l’instauration accélérée de mesures structurelles. C’est pour le moins étrange.

Un bon début ?

Les interlocuteurs sociaux venaient à peine de demander conjointement la prolongation du régime corona pour le chômage temporaire que plusieurs organisations patronales et des classes moyennes ont plaidé pour la prolongation des mesures de soutien corona et pour l’instauration de nouvelles mesures d’aide temporaires. Même la fin du moratoire sur les faillites, à juste titre vivement critiquée par les organisations de classes moyennes, est qualifiée pour la FEB  de «bon début». À l’instar des mesures sanitaires, mieux vaut ne pas l’abroger de manière imprudente tant que cette aide temporaire reste absolument nécessaire. Rien ne nous empêche d’anticiper les mesures de relance du  nouveau plan d’investissement pour la reprise et la résilience. Nous espérons que celui-ci  fixera les bonnes priorités et que les autorités du pays collaboreront plutôt que de continuer à travailler séparément. Nous attendons également de tous les gouvernements qu’ils mènent une concertation ouverte et constructive avec les interlocuteurs sociaux, comme l’exige l’Europe.

Travail sur mesure ou carcan?

Parallèlement, la FEB lance une fois de plus des propositions de réformes structurelles.
Les travailleurs savent dès lors à quoi s’attendre: flexibilité accrue, diminution des salaires, allongement de la carrière et recul de la sécurité sociale. Ainsi, la levée de l’interdiction du travail de nuit dans l’e-commerce est à nouveau dans le collimateur, alors qu’il n’y a aucune interdiction dans les faits. Seule existe l’obligation de se concerter avec les travailleurs sur cette question. Les employeurs semblent trouver parfaitement normal de pouvoir perturber unilatéralement la vie familiale.

Et maintenant que le mécanisme de la loi sur la norme salariale a, une fois de plus, placé les employeurs dans une position confortable en accordant une marge d’à peine 0,4% pour les nouvelles CCT, les travailleurs s’entendent dire qu’ils ont «l’énorme responsabilité» d’accepter cette option sans rechigner. Les employeurs pensent-ils vraiment que les syndicats ne tiennent pas compte des difficultés et des contraintes économiques lorsqu’ils négocient? Celles-ci diffèrent toutefois d’un secteur à l’autre et d’une entreprise à l’autre. C’est encore plus le cas dans ce contexte de crise sanitaire. Certains secteurs et entreprises ont souffert et souffrent encore. Mais il y en a également qui se redressent déjà. Tout comme il en y a qui ont bien profité de cette crise. C’est précisément la raison pour laquelle nous demandons une marge salariale indicative. La FEB évoque toujours le travail sur mesure et elle est la première à mettre en garde contre l’intervention des pouvoirs publics. Or, lorsqu’il s’agit de formation des salaires, elle se glisse parfaitement dans un carcan dirigiste à taille unique. Comme si la reprise ne pouvait découler que des investissements. Elle devra également venir du maintien et de l’augmentation du revenu disponible des travailleurs et des allocataires sociaux. En particulier, en augmentant sensiblement les bas salaires et les salaires minimums. Avons-nous oublié totalement les applaudissements dédiés à tous ces travailleurs «essentiels» qui ont maintenu ce pays à flot l’an dernier?

1% à répartir?

Concernant les allocations sociales, le fait que la carte blanche de la FEB ne remette plus en question le budget pour la liaison au bien-être des allocations sociales constitue déjà une avancée. La FEB adopte désormais une autre approche: les interlocuteurs sociaux ne devraient pas répartir le budget de façon linéaire mais «donner la priorité aux branches où l’impact sur la lutte contre la pauvreté est le plus important».  C’est à peine croyable car depuis un certain temps, la concertation sur la liaison au bien-être tourne en rond, les employeurs refusant toute conciliation dans ce dossier tant qu’ils n’ont pas obtenu un accord sur la norme salariale de 0,4%, parallèlement à une série de mesures de flexibilité.

Les employeurs bloquent systématiquement les demandes de majorer prioritairement les minima, notamment pour les pensionnés et les chômeurs. Pour les pensionnés, les employeurs veulent absolument répartir les deux tiers du budget sur l’ensemble des pensionnés au-delà du minimum: 1% pour chacun, quel que soit le niveau de la pension. Pour les chômeurs, leur priorité est d’augmenter les allocations les plus élevées, alors que les organisations syndicales, compte tenu du peu de moyens disponibles, continuent à faire pression pour donner la priorité aux minima les plus éloignés du seuil de pauvreté européen. La FEB veut manifestement changer de cap. Tant mieux! Ce dossier devrait donc aboutir à court terme. 

À quand cette boîte à outils pour lutter contre les licenciements secs?

Vers la fin de l’année, les annonces de restructurations se sont succédé. Ajoutons-y les dommages provoqués par le Brexit et – dixit la FEB – le  «bon début» des faillites. Nous devons éviter ensemble les licenciements secs en donnant la priorité à la redistribution du travail disponible et aux mesures d’aide pour la fin de carrière des travailleurs âgés. L’an dernier, une excellente boite à outils a été préparée pour les restructurations liées au coronavirus. Une boîte à outils similaire devrait être élaborée spécifiquement pour les restructurations liées au Brexit. Tâchons de combiner ces deux instruments dans le cadre  de la concertation à venir.
 

Olivier Valentin, secrétaire national de la CGSLB
Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la CSC
Thierry Bodson, président de la FGTB

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