Un marché du travail stable et plus inclusif

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    Notre modèle social a permis à de nombreux travailleurs de bénéficier d’un filet de sécurité pour leur permettre de faire face à la crise. Dans le même temps, cette crise a également mis en évidence les faiblesses de notre marché du travail. Celles-ci se manifestent depuis longtemps mais elles se sont aggravées de manière significative au cours de la dernière décennie.

    Ainsi, plusieurs catégories de travailleurs n’ont pas pu bénéficier d’une protection adéquate pour faire face à cette crise et ce sont ces travailleurs qui en subissent les effets le plus durement. C’est le cas des travailleurs temporaires, des intérimaires, des travailleurs de plateformes numériques, … La multiplication de toutes sortes de contrats précaires n’offrant pas une protection suffisante aux travailleurs concernés est problématique. Ça l’est d’autant plus lorsque ces travailleurs perdent leur emploi dans des circonstances comme celles que nous connaissons actuellement. Les syndicats soulignent depuis longtemps le danger de ces contrats précaires et flexibles mais cette crise nous le rappelle brutalement.

    Cette crise a également révélé certaines lacunes législatives. Ces lacunes ont permis des abus. On pense notamment aux discussions concernant le salaire garanti ou aux modalités de licenciement qui s’appliquent en période de chômage temporaire. Concernant ces sujets également, des leçons doivent être tirées et des mesures doivent être prises afin que ces abus ne puissent plus se reproduire dans le futur.

    Enfin, certains travailleurs ont malheureusement perdu, ou risquent de perdre leur emploi, à cause de cette crise. De nombreux jeunes qui entrent sur le marché du travail vont également pâtir de la situation économique post-corona. Plus que jamais, les conditions doivent être réunies afin d’offrir toutes les chances aux travailleurs, y compris les plus vulnérables, de pouvoir trouver leur place sur le marché du travail de demain. Une politique de formation efficace fait partie des conditions essentielles qui permettront que le marché de l’emploi de demain soit le plus inclusif possible et ne laisse personne sur le bord de la route.
     

    Moins d’emplois précaires, davantage d’emplois de qualité

    La CGSLB souhaite l'élaboration d'indicateurs sociaux relatifs au travail précaire, en vue d'inciter les entreprises à soutenir un emploi de qualité. Les travailleurs prestant sous contrat précaire sont les plus vulnérables lorsqu’une crise survient. La CGSLB propose un mécanisme afin de limiter leur utilisation. Le travail précaire doit être défini au niveau sectoriel en visant trois types d’emplois : les temps partiels involontaires, les contrats temporaires et le travail intérimaire. Une limite supérieure et inférieure doivent être fixées en se basant sur cette définition sectorielle et chaque entreprise aura ainsi un ratio qu’elle ne pourra pas dépasser. En cas de dépassement de ce ratio par un nombre trop important de contrats précaires, l’entreprise devra payer davantage de cotisations sociales. À l’inverse, les employeurs engageant moins sous contrats précaires que la limite inférieure fixée au niveau sectoriel pourront profiter d’une réduction de charge financée par les entreprises qui engagent trop souvent sous ce type de contrats. Les moyens générés au niveau de la commission paritaire pourront être affectés au soutien des groupes de travailleurs vulnérables qui sont les plus touchés par ces types de travail précaire afin de leur fournir des formations de qualité pour qu’ils puissent trouver un emploi à temps plein.

    La CGSLB demande une adaptation de l'article 10bis de la loi sur les contrats de travail. 30 jours avant la fin du contrat temporaire, l'employeur devrait être tenu à notifier au travailleur par recommandé qu’il lui offre un nouveau CDD ou CDI. Si l'employeur ne respecte pas cette obligation d’information, il devra verser une indemnité égale à un mois de salaire.

    La CGSLB demande la mise en place de mécanismes efficaces pour que le travailleur à temps partiel involontaire puisse recourir à davantage d’heures de travail de manière structurelle. Idéalement, il doit pouvoir obtenir un contrat de travail à temps plein. À cette fin, le rôle des organes de concertation devrait être renforcé en leur donnant davantage de possibilités d'évaluation en ce qui concerne le contrôle des heures réellement prestées par les travailleurs à temps partiel.

    Le travail intérimaire est source d’insécurité et de nombreux dangers en terme de flexibilité pour le travailleur. Le manque de protection se fait davantage ressentir en période de crise comme celle liée au coronavirus. La CGSLB demande que le travail intérimaire soit encadré par :

    • Un renforcement du rôle des organes de concertation lorsqu’il s’agit de décider de faire appel à des travailleurs intérimaires. Quel que soit le motif, l’employeur devra, avant toute embauche de travailleurs intérimaires, demander l’accord de la délégation syndicale ;
    • L’obligation de recourir à des contrats hebdomadaires à la place de contrats journaliers lorsque le travailleur intérimaire est régulièrement occupé auprès de l’utilisateur ;
    • Une limitation du nombre de contrats de travail intérimaire successifs auprès du même employeur en combinaison avec suppression de la période d’essai dans le secteur du travail intérimaire ;
    • La suppression de la possibilité de conclure des contrats de travail intérimaire à durée indéterminée ;
    • Un contrôle plus strict afin de s’assurer que les travailleurs aient effectivement accès à un CDI lorsqu’ils y ont droit ;
    • La possibilité pour les travailleurs intérimaires de pouvoir bénéficier du chômage temporaire -force majeure comme les autres travailleurs de l’entreprise lorsque l’intention de l’entreprise était de maintenir l’intérimaire sous contrat. Il faut donc instaurer l’obligation pour les employeurs – utilisateurs de maintenir les travailleurs intérimaires sous contrat lorsque la poursuite de l’activité est devenue impossible au sein de l’entreprise afin que les intérimaires puissent continuer à bénéficier du chômage temporaire. Si l’entreprise prétend qu’elle ne souhaitait pas maintenir le travailleur sous contrat et que le non renouvellement du contrat de l’intérimaire n’est pas lié à la force majeure, c’est à elle de le prouver.

    La CGSLB est opposée à la création de nouveaux statuts précaires. La Cour constitutionnelle a annulé la loi sur les revenus complémentaires exonérés d’impôts en date du 23.04.2020. La CGSLB s’en réjouit. Le manque de protection pour les travailleurs prestant dans le cadre de ces statuts précaires a été dénoncé depuis la création de ce régime. Ce manque de protection se fait plus visible encore durant la crise du coronavirus. L’absence de protection sociale se fait également particulièrement sentir pendant cette crise pour les travailleurs des plateformes. Ces travailleurs des plateformes doivent avoir accès à une protection sociale adéquate. La CGSLB demande notamment qu’ils puissent bénéficier d’une garantie de crise en cas de baisse brutale d’activité. Enfin, la CGSLB demande que les plateformes nouvelles et existantes soient étroitement surveillées.
     

    Renforcer la lutte contre les abus

    En ce qui concerne le salaire garanti, la CGSLB propose que le principe « la première suspension prévaut » en cas de chômage temporaire soit désormais inscrit dans la loi et qu’un traitement égal s’applique pour les ouvriers et pour les employés. Cela signifie tout d’abord que les travailleurs en incapacité de travail ne doivent pas perdre leur droit à un salaire garanti lorsque le chômage temporaire est invoqué par la suite et qu’ils ne peuvent être mis en chômage temporaire pendant la période de salaire garanti. Ensuite, l’article 56 de la loi sur les contrats de travail (uniquement d’application pour les ouvriers) doit être adapté pour permettre aux ouvriers d’exercer pleinement leur droit au salaire garanti.

    Alors que le chômage temporaire pour raisons économiques, la maladie et les vacances prolongent la durée du préavis, le chômage temporaire pour cause de force majeure ne la prolonge pas. Ainsi, certains employeurs risquent de licencier des travailleurs pendant cette crise sans devoir payer les travailleurs pendant la durée de leurs préavis. Ces travailleurs recevront alors des allocations de chômage temporaire. Cette différence ne se justifie pas et la CGSLB demande que la durée du préavis soit également prolongée en cas de chômage temporaire pour cause de force majeure et ce lorsque le préavis est donné par l’employeur. Cette mesure ne doit pas être seulement provisoire et se limiter à la crise du coronavirus. Elle doit être illimitée dans le temps. Enfin, comme en matière de chômage économique, le travailleur licencié en période de chômage pour force majeure ne doit pas prester de préavis s’il retrouve un emploi.
     

    Préparer la reprise en favorisant un marché du travail inclusif

    La CGSLB demande que des efforts soient faits en matière de formation afin de permettre aux travailleurs qui ont perdu leur emploi ou dont la situation a été fragilisée suite à cette crise de réellement renforcer leur position sur le marché du travail. Ces formations doivent être de qualité et l’accent doit être mis sur les compétences qui apportent une réelle plus-value au travailleur. Les compétences digitales ne doivent pas être négligées car elles sont déjà primordiales et le seront encore plus à l’avenir. 

    La CGSLB demande que les travailleurs qui n’ont pas pu suivre les formations prévues à cause de la crise du coronavirus puissent rattraper ces formations lors de leur reprise du travail. En outre, la CGSLB demande aux entreprises et aux secteurs de développer une stratégie à long terme afin de pouvoir anticiper les besoins réels de formation du personnel.

    La CGSLB demande un droit à caractère individuel et exécutoire pour tous les travailleurs d’obtenir au moins 5 jours de formation par an. Cette obligation doit prévoir des jours supplémentaires en faveur des travailleurs à faible niveau d’enseignement étant donné que les formations pour ce groupe cible sont moins onéreuses. Les employeurs qui ne respectent pas leurs obligations en matière de formation doivent être sanctionnés au profit de la collectivité des travailleurs. La CGSLB demande que ce droit à 5 jours de formation minimum soit également d’application pour les travailleurs engagés sous contrats temporaires ou intérimaires. Ces travailleurs doivent avoir droit à au moins 1 jour de formation chaque fois que la durée cumulée d’un ou plusieurs contrats atteint 3 mois.

    La CGSLB demande une augmentation de la durée du crédit-temps avec motif « formation » pour la porter à 48 mois. De cette manière, les travailleurs disposent de plus de possibilités de se réorienter complètement au cours de leur carrière en faisant mieux correspondre la durée de ce crédit-temps avec la structure d’étude bachelor-master de l’enseignement supérieur.

    La CGSLB demande que les compétences acquises par les travailleurs au cours de leurs formations soient transférables permettant ainsi de favoriser la mobilité professionnelle des travailleurs et de renforcer leur position sur le marché de l’emploi. Ces compétences acquises doivent pouvoir être utiles aux travailleurs tout au long de leur carrière professionnelle.

    La CGSLB demande au SPF Emploi de développer une base de données dans laquelle le travailleur peut faire enregistrer toutes les formations qu’il a suivies auprès de son ou de ses employeurs. Dans ce contexte, les parties concernées – soit elles-mêmes, soit par l'intermédiaire du syndicat – auraient la possibilité de consulter la liste des formations suivies auprès d’employeurs actuels ou anciens dans le cadre de futures candidatures.

    La politique régionale pour permettre la validation des compétences est un élément nécessaire pour les travailleurs dans leur recherche d’emploi ou de réorientation professionnelle.. Une coopération forte au-delà des limites de compétence est une nécessité absolue.

    La CGSLB demande que des efforts suffisants soient menés en faveur de la jeunesse. L’engagement pris par l’ensembles des pays de l’UE de veiller à ce que tous les jeunes âgés de moins de 25 ans puissent bénéficier d’une offre de qualité pour un emploi, une formation continue, un apprentissage ou un stage dans les quatre mois suivant la perte de leur emploi ou la fin de leurs études est un engagement important et la Belgique doit le remplir. La CGSLB insiste pour que ces formations soient de qualité et réellement efficaces.

    La CGSLB demande de réviser l’ensemble des réductions de charges accordé aux employeurs dans le cadre du tax shift. Les mesures linéaires en faveur des employeurs sont en contradiction avec différentes études scientifiques qui prouvent qu’une politique de réduction des charges sociales pour les bas salaires contribue nettement plus efficacement à la lutte contre le chômage. Ce sera encore plus clairement le cas suite à la crise du coronavirus. Les réductions structurelles doivent être converties, en se basant sur la littérature scientifique, en réductions de charges ciblées. En outre, toutes les subventions salariales fédérales existantes devraient être analysées. Bien que certaines subventions salariales puissent être utiles pour remplir certains objectifs, aucune ressource inutile ne devrait être destinée aux groupes cibles qui n’en auraient pas besoin pour la création d’emplois.
     

    Les jeunes, l’enseignement et le marché de l’emploi

    Si l’objectif est de former les jeunes pour qu’ils soient prêts à s’intégrer dans un marché du travail en constante évolution et hautement technologique, ils doivent être en mesure d'utiliser les nouvelles technologies, les équipements et les infrastructures dans leur formation. Aujourd'hui, nous constatons que cela fait défaut dans de nombreuses écoles, ce qui ne fait que creuser le fossé entre l'enseignement et le marché du travail. À cet égard, la CGSLB demande qu'une attention particulière soit portée à la mise en place d'une infrastructure numérique accessible dans l'enseignement. La crise du coronavirus et le passage forcé aux « cours en classe virtuelle » ont révélé un certain nombre de problèmes dans l'enseignement. De nombreux familles et élèves n'ont pas accès au matériel d'apprentissage numérique en raison de difficultés financières et/ou sociales. Malgré toutes les initiatives bien intentionnées, bon nombre d’élèves n’ont ainsi pas eu accès à une éducation garantie de qualité. Pouvoir disposer de matériel d'apprentissage numérique et avoir des connaissances (de base) en la matière sont des éléments essentiels pour l’acquisition des compétences nécessaires. Une attention continue devrait être accordée aux groupes à faible revenu et aux familles se trouvant dans une situation de précarité.

    En outre, la CGSLB demande que l'on investisse davantage dans les infrastructures éducatives, notamment dans le cadre de la numérisation. Nos écoles doivent pouvoir disposer des nouvelles technologies et des nouveaux équipements numériques en vue de préparer nos jeunes d’aujourd’hui à l’économie de la connaissance (numérique) de demain.

    La fermeture des écoles (et le « pré-teaching » en Flandre = la nouvelle matière donnée à distance aux élèves) auront également un impact sur le nombre de jeunes qui quittent prématurément l'école. A titre d’exemple, les chiffres (par rapport à la même période en 2019) du VDAB (l’homologue flamand du Forem et d’Actiris) sont en tout cas très inquiétants. La CGSLB demande à tous les gouvernements compétents d’élaborer des mesures cohérentes pour réduire au minimum ces sorties sans diplôme du système éducatif. Les responsables politiques de l‘Enseignement’ et de l’‘Emploi’ doivent unir leurs forces en vue d’élaborer (d'urgence) un plan d'action de lutte contre le décrochage scolaire. 

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